My Shareway to the World

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Réflexion Matinale #3

RM3

 

Ceux qui ont bâti et ceux qui veulent tout détruire; Ceux qui nous ont tout donné ou ceux qui veulent nous faire perdre tout.

Une lecture détachée de l’actualité du pays au regard des attaques terroristes ou insurrectionnelles -c’est selon- qui sont l’occasion ou le prétexte de tombée de masques ou de levée de boucliers peut être matière à débat, réflexion, interrogation ou préoccupation.
Débat dans lequel nous ne saurions évoluer sans convoquer les éclaireurs de consciences que nous avons sans doute refusé de suivre, à défaut de les avoir vu, lu ou entendu. Non sans puiser dans notre mémoire collective l’image de ceux qui ont été placardés malgré eux ou par devers eux comme des panneaux de signalisation tant verticale qu’horizontale que nous refusons de respecter, à défaut de regarder.
N’est-il pas ahurissant pour quiconque a une mémoire, a vécu ou connu le passé de ce « Rio dos camaroes » devenu « Land of Glory » à travers ses vaillants fils, de vivre un spectacle à l’antipode de ce pourquoi ont été sacrifiés ou ce pourquoi se sont sacrifiés ces repères et ressorts ?
Que ceci arrive au moment où on fête le centenaire ou cinquantenaire de nos martyrs, le cinquantenaire de nos « indépendances » ou le quarantenaire et plus de notre « unité nationale » donne à réfléchir.
Peut-on s’empêcher de convoquer à cette palabre ces immortels comme Fanon, dont les enseignements nous auraient permis de sortir du camp des « damnés de la terre », - qui a dit sauvagerie?
Nous aurait-il inspiré qu’on ne l’aurait considéré comme un prophète, lui qui n’était sans doute qu’un observateur averti et avertisseur, lui qui a parlé de cette « bourgeoisie nationale [de la période pré et post-indépendance qui] par son comportement mesquin et l’imprécision de ses positions doctrinales n’a pu éclairer l’ensemble du peuple, à poser les problèmes d’abord en fonction du peuple, partout où cette bourgeoisie nationale s’est révélée incapable de dilater suffisamment sa vision du monde, on assiste à un reflux vers les positions tribalistes ; on assiste, la rage au cœur, au triomphe exacerbé des ethnies. Puisque le seul mot d’ordre de la bourgeoisie est: remplaçons les étrangers, et qu’elle se hâte dans tous les secteurs de se rendre justice et de prendre les places… ». En sommes-nous si éloignés, des décennies après ? Et même si comme de mauvaise langues l’ont dit, « le noir n’aime pas lire » les livres je suppose, ne peuvent-ils pas aussi lire les pensées et les actes ? 
Loin et lointain ce Fanon pour les simples d'esprit, convoquons deux figures (le choix est subjectif voire fortuit) de notre histoire (pour le présent, on avisera) dans des domaines à la fois opposés et intégrés. Dans deux de nos aires géographiques que l’on tente d’opposer. Ahmadou Ahidjo et Simon Mpecke, alias Baba Simon. Le second dans le domaine social (lato sensu) et le premier dans le domaine politique (stricto sensu). Comme il est justement dit que tout pouvoir vient de Dieu, quelqu’en soit la nature ou l’avènement, comme on dit par ailleurs que Dieu sait ce qu’il fait, il viendrait à quiconque d’interroger "ce choix de Dieu" sur le Cameroun sous le seul prisme de la posture ou la position de notre premier « élu du peuple » que nos yeux ne sauraient se fermer sous un autre angle qu’on ne saurait occulter à la lumière des événements actuels, ailleurs et chez nous. Fanon nous aide encore à faire cette lecture. « Au lendemain de l’indépendance, les nationaux qui habitent les régions prospères prennent conscience de leur chance et par un réflexe viscéral et primaire refusent de nourrir les autres nationaux. Les régions riches en arachide, en cacao, en diamants surgissent en figure, face au panorama vide constitué par le reste de la nation. Les nationaux de ces régions regardent avec haine les autres chez qui ils découvrent envie, appétit, impulsions homicides. Les vieilles haines interethniques ressuscitent ». Qu’auraient été les régions septentrionales défavorisées au début de la construction de la nation - et non congénitalement car comme chaque région, elle regorge de ressources naturelles et humaines qui n’étaient ou ne sont pas encore exploitées de façon optimale à cause de cette politique coloniale qui consistait à « mettre à jour des ressources naturelles qu’il extrait et exporte vers les industries métropolitaines, permettant ainsi une relative richesse [sectorielle] tandis que le reste de la colonie poursuit, ou du moins approfondit, son sous-développement et sa misère », que seraient-elles devenues disais-je, si le premier président de ce cher et beau pays n’avait été de cette région ? S’il n’avait, par une « discrimination positive » (qu’il fallait estomper des excès et incongruités), par une recherche d’un certain équilibre régional (estompé des dérives), permis un « arrimage » et non rattrapage à l’ivoirienne, un « empowerment » d’un certain nombre d’élites de cette région autant que d’autres ? Ce n’est qu’une question qui mérite réponse. Loin de moi de minimiser le nationalisme et patriotisme des Um Nyobe et compagnie qui auraient équitablement "élevé le standard de vie" de toutes populations de toutes les régions du pays en même temps (les promesses politiques engagent en fait qui ?), mais cette question tient compte de l’analyse du risque qui n’était pas négligeable, tant le contexte post-indépendance et des serres du néo-colonialisme, aurait pu leur compliquer la tâche. Sekou Toure en sait quelque chose, même outre tombe. Ce sont les choses qui ne pouvaient arriver qu’aux autres, diriez-vous, car il y a longtemps que le Cameroun a été le Cameroun, vérité outre "mayo", mensonge en deçà. Encore que malgré ce que d’aucuns ont qualifié de favoritisme, l’état des lieux est celui qu’on connait et les voix ne manquent pas de ce côté-là pour à tort ou à raison, remettre en cause ou passer sous silence certains acquis. La nature humaine est ainsi faite, on se souvient plus du mal que du bien, on ne se contente pas toujours de ce qu’on a, à défaut de ce qu’on veut. Et justement, qu'elle serait la profondeur, la justesse et la pertinence des revendications si le fossé n'avait pas un tant soit peu commencé à être comblé? Il nous a été (par qui de droit et sans doute par la volonté divine) donné d'éviter ce drame à la magnitude de ce qu'on a connu ailleurs. Les velléités n'ont pas manqué. (N'a t-il pas étouffé les sirènes du cacao et du pétrole?).
Le premier président du pays a posé les jalons, construit la fondation, il nous appartenait de poursuivre en extirpant, si besoin était, les germes de la destruction s’il y en avait. Le second a voulu continuer l'oeuvre de bâtisseur. Y avons-nous contribué? Les a t-on aidé? A chacun de répondre pour soi-même. A mon humble avis, le spectacle offert tend plutôt à faire le procès (en sorcellerie) en paraphrasant Fanon et dire que l’unité nationale, credo d’Amadou Ahidjo, (voire l'intégration nationale, leitmotiv de son successeur) était ou est devenue une formule vague mais à laquelle les hommes et les femmes du Cameroun étaient (sont) passionnellement attachés et dont la valeur opératoire était (est) de faire terriblement pression sur le nationalisme, dévoile son vrai visage et s’émiette (risque de s’émietter) en régionalismes. « La bourgeoisie (l’élite) nationale, parce qu’elle est crispée sur ses intérêts immédiats, parce qu’elle ne voit pas plus loin que le bout de ses ongles (griffes), se révèle incapable de réaliser la simple unité (intégration, ndr) nationale, incapable d’édifier la nation sur des bases solides et fécondes ». Fanon dixit ! Observateur ou prophète? 
La deuxième figure emblématique que nous avons convoquée (qui a pourtant connu quelques difficultés du temps de l’autre et de son fait ?), l’a été à juste titre car « un trait d’union puissant entre le Nord et le Sud » (M. Hebga). C’est celui là même qui « a donné sa vie pour que nous vivions et grandissions. Il est devenu notre kulé - sacrifice », crédo proclamé par les enfants de la montagne en référence à Baba Simon. Aussi isolé que soit cet exemple, il nous parle et d’aucuns boucheront leurs oreilles, fermeront leurs yeux mais n’oseront pas ouvrir leurs bouches en public pour « reconnaître et encourager le mérite de chacun au profit de tous », sinon l’ouvrir en cachette car dit-on chez nous, « comme il y a la langue dans la bouche, autant il y aura (toute sorte) des paroles ». Combien de fils de ce pays ont autant donné leur vie pour le prochain, dans leurs villages ou régions, pour ne pas dire pour d’autres régions ou le pays? A contrario, combien ont pris (la vie) de leurs compatriotes de leurs propres villages et régions, pour ne pas parler d’autres régions ou le pays? Et ceux qui ont fait un tant soi peu preuve de fraternité, d'altruisme et sacrifices, ont-ils été exaltés et exhibés en exemple afin de renforcer notre communauté de destin ? Nous sommes-nous oints de leur lotions d’humanisme et d’altruisme au lieu d’ouïr les motions, d’esprit et de lettre de « partisianisme » et nombrilisme? Simple préoccupation, excusez du peu. J’en perds la parole, sinon je pourrais dire plus.

A bientôt !



14/04/2016
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